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LA CHRONIQUE D'ELS DE P@RIS : AU PORT DE L’ANGOISSE (USAP-CAB, 20e journée)

Els de P@ris

USAPiste bavard
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1 Août 2012
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AU PORT DE L’ANGOISSE

Pour faire un bon roman noir, c’est bien connu, il faut plusieurs ingrédients. Le match de samedi dernier nous en a offert un bon paquet, si ce n’est tous…

D’abord, il faut un cadre. Un lieu qui vous serre le ventre, un peu poisseux, où on ne sait pas trop où l’on met les pieds. Autant dire qu’Aimé Giral pouvait émarger à la définition samedi dernier…Bien sûr, on n’est pas dans le Los Angeles de James Ellroy ou de Michael Connelly, ni dans le Marseille de Jean-Claude Izzo (ou Gaudin, mais c’est moins intéressant à lire…), notre stade n’a rien d’un lieu aussi interlope qu’un entrepôt portuaire dans une nuit encore noircie par une étonnante panne de réverbère, mais quand même…
Après le tabassage en bonne et due forme subie du côté du quartier Du-Manoir, après le quasi-braquage réussie par les délinquants en col (ciel et) blanc du Métro Racing, la crainte de se voir balancé au fond du Top 14 avec des chaussures en béton devenait palpable. Si on ajoute à cela les vides dans les tribunes, le froid qui gagne le public depuis des matches, on pouvait voir dans notre stade bien-aimé le lieu idéal pour un traquenard, non plus pour l’adversaire, mais pour notre équipe elle-même.
À tel point qu’avec plus ou moins d’adresse, nos joueurs et le staff avaient appelé à l’union sacrée de la famille sang et or. À défaut de s’aimer cette année, il était temps de se ranger les velléités de vendetta et de sauver le clan, pour ne pas subir le triste sort des bandes de Narbonne ou de Béziers, et de ne pas faire l’an prochain un remake de polars vintage type « Le clan des Siciliens » tous les week-ends. Attention, je ne dis pas que cela manque de charme, mais c’est nettement mieux à la télé qu’en vrai…

Autre ingrédient fondamental pour un bon roman noir, un méchant, ou plutôt un adversaire, qui sert l’ambiance décrite plus haut. Dans ce registre, nos adversaires du soir paraissaient les candidats idoines. D’abord par leurs couleurs (ou non-couleurs, mais n’entrons pas dans ce débat), où le noir et blanc fait écho à la dualité et à l’ambiguïté nécessaires à faire de bons héros de polars. Mais aussi par leurs caractéristiques, avec un style tout en sobriété, parfois minimaliste, mais qui ne fait pas dans la dentelle et punit impitoyablement ceux qui ne sont pas là pour la castagne, en particulier ceux qui osent (bon, ils n’ont pas le choix) franchir les limites du territoire corrézien. Nos joueurs en avaient fait l’expérience au match aller, tout comme la redoutable bande de la Rade, qui s’était faite désosser et avait finie éparpillée façon puzzle aux 4 coins du stade…
Parmi cette bande rustique, au genre quasi-agricole, quelques gros bras savent marquer les esprits, comme le terrible Sisa Koyamaibole, digne du méchant à chapeau de Goldfinger (en plus costaud), mais aussi le redoutable Arnaud Méla, dit le Pirate, un dur, un tatoué, comme on aimerait tant en avoir dans notre bande sang et or cette saison pour expliquer le sens de la vie à nos adversaires, mais aussi à certaines de nos petites frappes…
Autant dire qu’il allait falloir retrouver nos flingues de concours, d’autant que nos meilleures gâchettes étaient parties loin de la Catalogne défendre leurs territoires nationaux respectifs. Face à des adversaires qui ramenaient la totalité de la famille, tout avait l’allure du piège, et même si notre chef de bande voyait dans ce match l’occasion de faire une course de vitesse, on ne doutait pas que ce match, s’il se gagnait, le serait sur un scénario nettement plus basique que cela…

Car voilà désormais l’élément clé du bon roman noir, le scénario. Pas grand-chose à redire sur le scénario global de ce Top 14, où on passe en deux victoires de la cave à la terrasse, et où on passe en deux défaites de la sérénité aux sueurs froides. Pas grand-chose à rajouter non plus à la série noire de notre USAP, qui nous fait entendre la musique de Miles Davis dans « Ascenseur pour l’échafaud » avec de plus en plus d’insistance. Restait à voir ce que le terrain pourrait nous réserver.
Le début de match était sur ce point conforme au scénario le plus prévisible. D’un côté, des Brivistes en embuscade, rendus sereins par le casse réussi contre la bande de Jean-Bouin il est vrai diminuée, et qui attendaient tranquillement pour placer des contres assassins. De l’autre, nos hommes sans aucun doute motivés, présents dans l’engagement, avec un Guirado en chef de bande retrouvé, un Romain Tao de plus en plus à l’aise dans son rôle de terreur de seconde ligne (même si au concours de la mine patibulaire à barbe, il devait laisser la première place à son vis-à-vis Waqaniburotu), mais la main tremblant toujours au moment d’en finir, peu aidés par un manque de confiance palpable…
Du coup, le match se limitait à quelques escarmouches, et comme les tireurs d’élite semblaient avoir oublié la lunette de leur fusil aux vestiaires, le score bougeait peu. Bien sûr, Radikedike manquait de jouer la fille de l’air dans notre défense, puis c’était à notre capitaine de forcer la porte des Brivistes, avant que Leo ne remette un coup de boutoir, mais des maladresses de part et d’autre faisaient que tout ce petit monde finissait pris par la patrouille, et seulement avec du sursis au bout du compte…
Tentatives de braquage désordonnées, éclairs suivis de maladresses, on était bien dans le scénario qui oppose une équipe qui attend à une équipe qui doute. Et si nos gros bras semblaient prendre l’ascendant dans l’épreuve de force, la perte de notre chef de bande des ¾ inquiétait, mais pas autant que l’incapacité de Descons à trouver la cible. Et malgré un sublime éclair de Mafi, c’était bien Brive qui virait en tête sur une ultime pénalité.

Le scénario tournait alors à un mélange de hold-up et de peur sur la ville, et c’est un froid glacial qui s’abattait sur les dos des supporters, du Six au stade, d’autant que les Brivistes revenaient des vestiaires avec l’intention de braquer notre en-but et de repartir avec la caisse. Fort heureusement, dans le sillage de son 5 de devant, l’USAP avait retrouvé de ces vertus qui sont indispensables pour survivre dans la jungle du Top 14 : une défense agressive qui renvoyait la terreur Koyamaibole sur le banc, un Romain Tao dont les pinces broyaient au sol les actions brivistes, une mêlée retrouvée. Tout cela permettait à nos joueurs de repousser leurs adversaires et de les pousser dans leurs retranchements, avec notamment un Votu vaillant, à défaut d’être décisif.

C’est alors que se produisait un élément fondamental du genre, le coup de théâtre. Plus que de théâtre, le coup en question ressemblait plus à une lâche agression dans le dos de notre capitaine, par un Briatte réglant on ne sait trop quel compte, et rapidement pris en main par un Romain Tao visiblement désireux de parfaire son éducation du code d’honneur des gangs du rugby. Les 10 minutes de frigo semblaient un minimum, mais nous permettaient de reprendre la main.
Cependant, si la domination catalane était désormais réelle, elle tardait à se concrétiser, et on sentait encore le manque de confiance, cette main qui tremble au moment d’achever l’adversaire. Il fallait deux actions d’ampleur avec un Mafi retrouvé dans le rôle de perceur de coffre-forts pour enfin passer devant de trois petites unités, et même si Taumalolo éteignait littéralement Radikedike, l’USAP s’avérait incapable d’achever les Corréziens, et le tir trop court de Descons à 40 mètres en face montrait les limites de l’artillerie catalane, malgré une combativité jamais prise en défaut. La délivrance arrivait enfin à 2 minutes de la fin sur une pénalité enfin réussie. Délivrance, du moins le croyait-on…

Car pour qu’un roman noir soit réussi, il faut également ménager un ultime rebondissement, un ultime suspense. Et on sait que pour faire perdre des années de vie à nos pauvres cœurs, l’USAP s’est toujours admirablement entendue… Comme contre le Racing, l’infortuné et fatigué boucher des Highlands perdait la balle, donnant aux Brivistes l’occasion de réussir un hold-up encore plus parfait que ce lui du Racing. Sachant que dans le même temps, Oyonnax était sur le point de faire le casse du siècle à Jean-Bouin, tous les supporters sentaient le froid de la lame du couteau s’enfoncer tranquillement entre leurs côtes… Fort heureusement, il arrive que des polars ne se finissent pas trop mal, et si ce sont souvent les moins bons, on ne demandait pas au scénario de samedi autre chose qu’un happy end. Un en-avant des zèbres et une pénalité de M. Steyn du côté de l’Ouest parisien transformaient l’abattement en soulagement. L’USAP était encore en vie, et sa cage thoracique se desserrait un peu.

Finalement, que retenir ? Le problème avec ce genre de littérature, c’est qu’elle vous attrape sur le moment, puis qu’on oublie assez vite. Sur le plan du rugby, en effet, ce match était tout ce qu’il y a de plus oubliable. Mais on peut se féliciter d’avoir évité le désastre, tout comme on peut se réjouir d’avoir retrouvé des vertus fondamentales.
À ce titre, on espère que ce recentrage ne sera pas sans lendemain. Il reste encore à écarter Biarritz et Oyonnax, et ces deux équipes ont montré samedi qu’elles n’avaient absolument pas déposé les armes. Ce match peut aider à retrouver de la sérénité, des valeurs, et avec le retour des cadres, il doit permettre d’assurer une fin de saison qui, à défaut d’être glorieuse, serait plus agréable si elle ne se faisait pas jusqu’au bout avec le revolver sur la tempe !
 
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