Le président de l’USAP, François Rivière a réalisé une interview visio de 1h avec Bruno Rolland avant de se préparer pour le match contre Bayonne, prévu ce samedi à 17h15. L’homme fort du club depuis près de dix ans, connu pour son enthousiasme et sa loquacité, a consacré plus d’une heure en visioconférence, aux côtés de son directeur général Bruno Rolland, à discuter de l’avenir à court et moyen terme de l’USAP. Le club, actuellement treizième au classement du Top 14, nourrit de grandes ambitions après avoir remporté trois de ses quatre derniers matchs.

« Quel bilan tirez-vous de la saison de l’USAP à sept journées de la fin du Championnat ?
Cela va vous paraître curieux mais la situation sportive continue de très bien progresser sur le plan de la solidarité et de la confiance. Voilà sept ou huit semaines, il y a eu cette petite mise au point de ma part après le match perdu à Clermont(défaite 31-20, le 7 janvier)Et ce qui est le plus intéressant dans ce qui se passe depuis, c’est que, chaque jour davantage, on met en place cette confiance dans le collectif. Il se trouve que le ballon a l’air de vouloir tomber du meilleur côté depuis quelques matches, mais c’est compliqué. Objectivement, notre vraie place sportive est probablement entre la 10e et la 12e place cette année, et pas entre la 12e ou la 14e. L’état d’esprit est remarquable dans ce groupe. J’en suis très fier.

Après cette défaite contre Clermont, avez-vous pensé à vous séparer de votre manager Patrick Arlettaz ?
Le lendemain, Patrick est venu, seul, à mon domicile pour échanger avec moi et Bruno Rolland. Il m’a dit : « Si ma présence est de nature à fragiliser l’édifice et que je ne suis plus l’homme qu’il faut, ne pense pas qu’il y aura un problème administratif ou juridique avec moi. » On a ensuite parlé de la saison suivante. Il m’a redit que ça faisait six ans qu’il était là, que la tâche était très usante et qu’il pouvait être bon de passer la main. J’en ai parlé avec mes administrateurs et j’ai contacté quelques leaders, dont Mathieu Acebes, pour voir ce qu’ils en pensaient. Ils m’ont dit d’une manière très nette qu’ils voulaient terminer la saison avec le staff actuel et qu’ils allaient se battre pour se maintenir. J’ai dit au groupe : « Vous avez souhaité que je vous fasse confiance pour tenir le volant, je vais faire mieux et vous donner les clés du camion, mais je vous demande des résultats. » Jamais les joueurs n’ont menacé personne et j’ai vraiment apprécié qu’ils forment un pack solide autour de leurs entraîneurs pour s’en sortir.

L’USAP s’appuie sur l’un des plus petits budgets du Top 14. Qu’en est-il vraiment ?

Nous avons un budget global de 19,5 millions d’euros, le plus gros budget de l’histoire de l’USAP. Pour la première fois, il dépassera les 20 millions la saison prochaine. Cela nous place aujourd’hui dans les trois derniers budgets du Top 14. Notre chance est qu’on est très peu dépensiers. Nous avons cette année une masse salariale de sept millions. L’an prochain, je souhaite qu’elle passe entre sept millions et demi et huit millions. Avec un budget de 20 millions, je pense qu’on est capables de pouvoir se stabiliser entre la 10e et la 12e place. C’est l’objectif que je donnerai au sportif. Si on veut rentrer à l’intérieur des dix premières places à terme, c’est-à-dire entre six et dix, il faut un budget qui s’approche des 25 millions.

Aujourd’hui, est-il compliqué de faire venir des joueurs avec votre budget ?
Oui, bien sûr, mais on y arrive quand même. Les petits clubs se font piller leurs joueurs de plus en plus tôt, notamment les Espoirs. Ils sont démarchés à 16 ou 17 ans. Il faut qu’on soit plus malins, comme quand on récupère des joueurs comme Tristan Tedder ou lors du malheureux dépôt de bilan des Wasps (l’USAP a récupéré leur troisième-ligne Brad Shields). Vous remarquerez que certains joueurs qui ont quitté le club, ce qui nous a parfois agacés, n’ont pas eu pour autant une magnifique carrière dans d’autres clubs. J’en citerai un qui est parti à Bordeaux-Bègles et qui a annoncé son départ pour Lyon l’an prochain (Alban Roussel), tout ça pour ça… Il aurait mieux fait de rester. Et ce n’est pas le seul. Je ne suis pas certain qu’Enzo Forletta s’éclate tant que ça à Montpellier, pas plus que Melvyn Jaminet à Toulouse où il se retrouve dans une concurrence de dingue. Il aurait peut-être été encore plus en valeur dans un club comme l’USAP. C’est aussi pour ça que, comme de nombreux clubs notamment de Pro D2, je pensais que le salary-cap devait continuer de baisser.

« Dès cette année, je vais ouvrir l’actionnariat à l’extérieur pour préparer le fait que, d’ici trois ou quatre ans, je passerai la main après avoir stabilisé l’édifice. Le temps est venu d’aller plus loin et plus vite. » François Rivière

Serez-vous encore à la tête de l’USAP dans les années à venir ?
Quand j’ai eu mon terrible accident il y a six ans et que je suis resté longtemps dans le coma (François Rivière avait été éjecté d’un manège dans une fête foraine à Narbonne fin 2015), puis que j’ai réappris à respirer, à marcher, j’ai été frappé par la gentillesse des supporters. Ç’a créé des liens indestructibles. Par ailleurs, quand je suis arrivé, il y avait beaucoup de difficultés financières. Ça m’a effectivement coûté beaucoup d’argent. Ça fait neuf ans que je suis à l’USAP. Je pense aussi qu’il est important au bout d’un certain temps de préparer le fait de passer la main. Il faut savoir ne pas user. Dès cette année, je vais ouvrir l’actionnariat à l’extérieur pour préparer le fait que, d’ici trois ou quatre ans, je passerai la main après avoir stabilisé l’édifice. Le temps est venu d’aller plus loin et plus vite.

Et concernant le staff et l’identité du nouveau manager ?

Je suis fier du staff et il n’est pas question de le fragiliser. Patrick m’avait dit qu’il voulait prendre de la distance pour des raisons personnelles, et pour nous il est important de renforcer les compétences. Ça veut dire en ajouter à celles qui sont là. On parle de David Marty(près de 300 matches pour l’USAP entre 2002 et 2016, 37 sélections en équipe de France), qui était un joueur exceptionnel, Guillaume Vilaceca, qui a été capitaine du club, Perry Freshwater, qui a joué la Coupe du monde (avec l’Angleterre en 2007), et Gérald Bastide, qui a été entraîneur de la défense du quinze de France (2015-2017). Je leur ai dit : « J’ai confiance en vous, ayez confiance en moi et restez sur votre objectif qu’est le maintien. » On ne veut pas se tirer une balle dans le pied.

En revanche, il faut réfléchir aux candidatures que je reçois pour renforcer la performance et le challenge sportif. Nous recherchons un manager avec qui nous pourrons construire une nouvelle étape de notre projet sportif. Il faut forcément que ce soit quelqu’un qui puisse accepter ce qu’est notre territoire catalan et qui conforte l’équipe existante.

L’autre défi est de développer les infrastructures du club…
Oui, c’est essentiel. Si on veut arriver à ces 25 millions d’euros de budget d’ici trois ou quatre ans, il faut qu’on ait des infrastructures qui soient en rapport. Le nouveau centre d’entraînement est lancé. Il sera inauguré pour la saison 2024-2025. Il faut aussi lancer avec l’association le nouveau centre de formation. Enfin, en ce moment avec toutes les collectivités locales, nous travaillons à un budget de rénovation du stade Aimé-Giral de 15 millions d’euros. On doit en faire un lieu de vie avec aussi un musée qui reprend toute l’histoire du club. »