Ancien joueur et entraîneur du RCNM, le technicien de l’USAP, Patrick Arlettaz, évoque son héritage narbonnais à cinq du jour du derby .
Et si Patrick Arlettaz, Catalan jusqu’au bout des ongles, « teignous » à souhait, rustre techniquement, avait été façonné (déformé disent les mauvaises langues sang et or) à Narbonne et par Narbonne ? La question n’a rien de provoquant à quatre jours d’un derby RCNM-USAP qui s’annonce dramatique pour le perdant, dimanche au Parc des Sports et de l’Amitié. Elle tient aux pérégrinations du joueur qui, en milieu de carrière, s’est offert un bail de cinq ans au RCNM (1996-2001) où, s’enthousiasme-t-il, il s’est littéralement éclaté. « À cette époque, le Racing était sous influence toulousaine, avec les Bondouy, Marfaing... ça m’a ouvert à d’autres horizons, d’autres façons de voir le jeu. Je me suis totalement retrouvé dans cette mentalité, sans oublier le pragmatisme, le combat, l’austérité, tout ce que m’avait inculqué le rugby catalan et qui fait partie de moi. »
Naissance du Arlettaz esthète. Une étiquette qui ne l’a plus quitté et qui, aujourd’hui, imprègne totalement la philosophie de jeu du technicien. Avec cette autre question, paradoxale celle-là : ce rugby ambitieux est-il taillé pour la Pro D2 ? Les trois années (2008-2011) où Patrick Arlettaz entraîna Narbonne sèment un léger doute. Treizième du classement en 2009, septième en 2010, treizième en 2011, ce RCNM présidé par Joël Carrère, managé par Henri Ferrero et entraîné par Patrick Arlettaz aux côtés de Richard Crespy et Richard Castel, était plus spécialement réputé pour régaler la galerie, moins pour ses résultats. « Arlette », un coach que les joueurs adorent mais - pour l’instant - pas verni question réussite sportive. À sa décharge, d’aucuns diront légitimement qu’il entraînait un petit club. « Petit club, certainement pas. Petit budget, oui. Ma deuxième année (2010) est un regret. Le groupe était sympa, il aurait mérité de participer aux phases finales. Le reste du temps, on n’avait pas d’autres moyens que de jouer le maintien. On n’avait pas l’effectif pour viser autre chose. »
Rugby et efficacité
À 45 ans - il les aura le 20 avril - l’actuel entraîneur de l’USAP se ferait couper la langue plutôt que de renier son héritage, mélange de catalanité et de « narbonnitude ». « L’USAP et le Racing génèrent une même passion autour du rugby. En revanche, le rapport au jeu diffère totalement. Narbonne a été bercé par le rugby clinquant des seventies, avec Maso, Codorniou, Sangalli, Maratuech, Claude Spanghero... Conséquence : le public est très exigeant. À Perpignan, la manière est souvent pardonnée s’il y a la victoire au bout. À Narbonne, il faut les deux pour satisfaire le public. » Dimanche fera sans doute exception, étant donné la menace de relégation qui pèse sur le club audois.
De son côté, Arlettaz n’a qu’une obsession : garder l’USAP en vie en vue d’une éventuelle qualification pour les phases finales. L’homme, foncièrement honnête, même à son détriment, sait déjà où on l’attend. « Je sais qu’on dit que le jeu que je prône n’est pas toujours efficace. Mais on peut le tourner dans tous les sens, dans n’importe quelle division, les équipes qui gagnent sont celles qui envoient du jeu. La Rochelle, Pau, Lyon et Agen ne sont pas montés en Top 14 en faisant des cocottes et des chandelles mais en pratiquant un jeu de possession, de mouvement, d’alternance. » Sous-entendu : l’USAP doit elle aussi emprunter cette voie si elle veut accéder au firmament. « Toutes les équipes qui se construites et sont montées en Top 14 ont suivi ce modèle-là », assure Patrick Arlettaz, dont les convictions se sont forgées dans la difficulté. D’où leur caractère inébranlable. A l’image du personnage.
