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Joueurs De Rien .

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Joueurs De Rien
Emilie Dudon

Ils sont quelques dizaines, en Top 14 et en Pro D2, à ne pas faire partie des plans de leur staff. Jamais ou presque. Comment ces joueurs, qui sont payés et pour qui le rugby est un métier, vivent-ils cette situation au quotidien ? L’entourage et l’environnement s’avèrent déterminants dans ces cas-là. Une aide extérieure est parfois nécessaire, à l’image de la cellule de soutien psychologique mise en place par provale.

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Il y a ces regards. Ou pas, justement. Ces coéquipiers qui baissent les yeux quand, à chaque annonce du groupe, votre nom n’est pas cité. "C’est presque une forme de pitié. Les mecs sont désolés pour toi." Benoît Guyot a bien connu ces "moments très particuliers". L’ancien troisième ligne, international avec les moins de 20 ans tricolores, a connu le placard, comme on dit, lors de sa dernière saison (à La Rochelle en 2015-2016). Habitué à enchaîner les matchs à Biarritz, où il faisait partie des cadres, il n’avait disputé que deux rencontres de Top 14 dans la saison. Et trois de Challenge européen aussi, pour une seule titularisation. Un long calvaire, qui l’avait poussé à prendre sa retraite à 27 ans et à se tourner vers les études pour décrocher son doctorat en gestion de la performance sportive. "Les semaines étaient particulièrement déprimantes. Je faisais du physique, cela n’avait plus aucun sens. Je jouais avec les espoirs et quand il n’y avait pas de matchs, Patrice Collazo me disait que je pouvais être libre dès le mercredi. Je me rendais aux entraînements en moto et j’avoue qu’il m’est arrivé de faire deux ou trois fois le tour de La Rochelle avant d’y aller parce que je n’en avais pas envie…"

Seuls face à l’échec
Ça ressemble à quoi la vie d’un joueur de rugby qui ne joue pas au rugby ? Qui s’entraîne chaque jour et s’enfonce chaque week-end ? Qui, en pleine possession de ses moyens, n’est juste pas considéré assez performant pour exercer son métier ? À une forme de supplice, lent et douloureux : "J’ai voulu rester irréprochable dans mes attitudes, ne rien lâcher et j’ai essayé de tenir jusqu’au bout mais à un moment, tu ne peux plus. Il y a un sentiment d’injustice énorme", poursuit l’ancien flanker. Julien Malzieu raconte : "Quand le coach a besoin de toi, tu fais le bouclier humain. Quand ce n’est pas le cas, tu fais de la muscu, de la préparation physique, des soins… J’ai parfois démarré des entraînements puis je rentrais aux vestiaires, en cours de séance, quand les mecs se mettaient à bosser les lancements collectifs. Je n’étais là que pour faire le nombre." International tricolore à vingt reprises, l’ancien ailier a connu l’enfer du frigo, pas utilisé une seule fois par Jake White lors de la dernière saison de sa carrière, à Montpellier (2016-2017). "J’étais au fond du congélo oui ! Je crois même qu’ils avaient créé une chambre froide tout spécialement pour moi… Ah si ! Il y avait aussi un pilier sud-africain (Schalk van der Merwe, N.D.L.R.) qui ne faisait jamais une feuille de match lui non plus, après s’être blessé à une épaule." L’entraide, dans de tels moments, est primordiale mais presque anecdotique : le sportif professionnel ne peut être que seul face à son échec.

C’est une forme de soumission (Elissalde)
C’est là que son entourage et son environnement s’avèrent déterminants. "Je me suis un peu réfugié dans mes études, reconnaît Benoît Guyot. Côtoyer des gens en dehors, qui ne venaient pas au stade et ne me voyaient pas forcément comme un joueur de rugby, m’a fait un bien fou." L’encadrement au sein du club, aussi, est capital. Il reprend : "Nous avons toujours discuté avec Patrice Collazo. C’est quelqu’un qui est dans l’affectif, mine de rien. Il avait des contraintes à gérer, je le comprends. Puis-je lui en vouloir ? Je ne sais même pas. Je n’en ai pas envie, je sais qu’il ne l’a pas fait contre moi. C’est le sport. C’est ingrat mais c’est comme ça. Et c’est inhérent au haut niveau surtout : quand on signe un contrat, on prend le risque que cela arrive." Le comportement du staff peut toutefois changer beaucoup de choses dans ces moments.Julien Malzieu peut en témoigner, qui était complètement ignoré par Jake White : "Je n‘existais pas à ses yeux. Il disait bonjour quand il me croisait et encore… Il détestait le conflit. Pourtant, j’aurais aimé avoir juste une explication." À vrai dire, la place et l’implication des joueurs hors groupe sont différentes d'un club à l’autre. Complètement écartés du reste de l’équipe ou totalement intégrés à la semaine de travail, selon le fonctionnement du staff. Pour l’entraîneur des trois-quarts du XV de France, Jean-Baptiste Elissalde, "ces joueurs font partie intégrante du projet. Ce sont eux qui font que les séances sont dynamiques, qu’il y a du monde aux entraînements mais c’est parfois douloureux car c’est une forme de soumission pour ces garçons". Il faut savoir les gérer : "Il faut être très objectif, surtout, et ne jamais leur mentir. Si vous leur faites des promesses que vous ne tenez pas, vous vous les collez à dos. J’ai vu des mecs qui, les pauvres, étaient toujours remplaçants ou hors du groupe mais qui gardaient un comportement extraordinaire. J’en ai vus d’autres moins « bonnards », qui ne se rendaient pas compte qu’ils étaient hors du coup ou moins talentueux et qui foutaient le bordel à l’intérieur du vestiaire. Ceux-là oublient une chose : l’équipe est toujours plus forte et plus importante que l’individu, que vous soyez la star ou le troisième choix." Sacrifiés sur l‘autel du collectif, les « placardisés » n’ont d’autre choix que de subir. Et tenter d’inverser la tendance en essayant de briller avec les espoirs. "J’y ai été de mon plein gré, je voulais leur montrer que j’étais encore là, motivé, se souvient Julien Malzieu. Cela n’a pas suffi mais ça me faisait du bien au moral. Nous partions en bus ou en train, on buvait des bières au retour. ça me rappelait mes jeunes années au Puy-en-Velay…"

Salaires et culpabilité
Quand il n’y a plus d’issue toutefois, certains vont au bout des choses, à l’image de Hugh Chalmers. Le troisième ligne néo-zélandais a choisi de rompre son contrat à l’UBB en février dernier, après seulement trois matchs joués depuis le début de la saison. Il a eu, durant ses dix saisons au sein du club girondin, l’occasion de croiser ces mis au banc, avant d’en devenir un : "J’ai parfois été mal à l’aise pour eux. Après, il ne faut pas croire que tout le monde est ami dans une équipe professionnelle. Ce n’est pas le monde des Bisounours. Nous sommes des collègues qui travaillons pour gagner notre pain. Si tu ne joues pas, tu sais que certains s’en foutent…" Il reste toutefois persuadé qu’il peut y avoir de la place pour tout le monde : "Dans le rugby d’aujourd’hui, le côté humain est souvent oublié. Je me suis toujours demandé pourquoi recruter des joueurs si on les utilise peu, surtout dans une saison qui dure presque dix mois. En fait, tout dépend de la décision d’un seul homme et c’est très cruel. Je crois que dans une équipe, tout le monde doit jouer un rôle. Avec une concurrence saine et un bon management, il ne devrait pas y avoir des gars qui jouent presque jamais dans un effectif professionnel."

Il y en a, pourtant. Qui tentent de trouver un sens à leur quotidien et à leur métier. "C’est d’autant plus difficile à vivre que nous sommes payés pour jouer. Personnellement, je ne conçois pas de gagner de l’argent sans rien faire. Il y avait un sentiment d’inutilité, presque de culpabilité", conclut Benoît Guyot. Il fait partie des rares à avoir accepté d’évoquer le sujet. Trop sensible. Trop douloureux, notamment pour ceux qui sont encore en activité : "C’est particulier d’en parler, je n’ai pas envie de passer pour le mec qui se plaint. Je peux le faire plus facilement parce que je m’en suis sorti mais la réalité, c’est que certains joueurs vivent de véritables situations de détresse. Ce genre de choses pourrait être mieux géré. Le sport a besoin d’humain, de temps. Le problème, c’est que les clubs n’en ont pas : ce dont ils ont besoin, eux, c’est de résultats alors ils travaillent dans le court terme." Rugbyman, finalement, est un métier comme un autre.

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Emilie Dudon

Journaliste
 
Dernière édition:
Bel article. Des joueurs qui souffren tde ne pas jouer il y en a dans tous les clubs. Le rôle du staff est primordial dans la difficile gestion d'un groupe de joueurs professionnels. Pour autant certains joueurs se mettent dedans tout seul en signant au mauvais endroit. Vouloir quitter un club dans lequel on a un rôle important pour un club "plus ambitieux" peut se payer cher. Guiry est un bel exemple.
 
honnetement, chez nous c'est pareil, sans les blessure de piukala, mafi, bousquet le depart de ratini ...
je pense qu il serait arrivé la même chose à torfs ou pujol
sans la maladie de pot, pareil pour seguy
 
Le gros problème pour un staff , c'est la recherche permanente du résultat en alignant ceux , qu'il considère les meilleurs à leurs postes.

Faire tourner ,tout en maintenant la performance c'est possible , mais risqué . Les supporters et dirigeants ne se privent pas de critiquer le staff si d'aventure la défaite survient en mettant au repos des " titulaires " , mais également s'il maintient un groupe restreint ,il est alors accusé de faire jouer des joueurs usés.

L' alchimie ,pour régénérer un groupe , doit aussi tenir compte des blessures , maintenir la motivation de tous en fixant un objectif , la manière pour y arriver, les rôles de chacun, tout cela n'est pas si évidant a réaliser ,qu'a faire. Il faut beaucoup d'humain et d'affectif de part et d'autre .
 
Pour l'entraineur, c'est compliqué. Quand ton N°1 et ton N° sont valides, le N° 3 doit se contenter de miettes, c'est le jeu.
Mais les joueurs ne sont pas exempts de reproches. Quand t'es 10 et que tu signes à Toulon, tu sais que ce sera compliqué !
Même un mec hyper talentueux comme Mermoz s'est brulé les ailes à Toulon.
De la même manière que, dans les contrats, il y a des clauses de rupture en cas de descente, il faudra peut-être que les joueurs exigent des clauses de rupture s'ils jouent moins que x minutes. Et il faudra qu'ils décident s'ils préfèrent cirer les tribunes en top 14 ou jouer en D2.
 
Si Benoît Guyot n'a pas eu la modestie d'aller jouer pour un salaire moindre dans un plus petit club de Top 14 ou pro D2 , je ne vois pas pourquoi il pleure .
C'est surtout qu'à vouloir péter plus haut que leur c** , il y a des joueurs qui se sont chier sur la gueule .
Dans tous les sports d'équipe , il y a les seconds couteaux, les porteurs d'eau du cyclisme , les Sparring-partner de la boxe , les caddys au golf, il y a les bons et les moins bons .
Les "moins bons" sont indispensables dans un club , mais ce n'est pas eux qui font gagner les matchs.
 
Pour l'entraineur, c'est compliqué. Quand ton N°1 et ton N° sont valides, le N° 3 doit se contenter de miettes, c'est le jeu.
Mais les joueurs ne sont pas exempts de reproches. Quand t'es 10 et que tu signes à Toulon, tu sais que ce sera compliqué !
Même un mec hyper talentueux comme Mermoz s'est brulé les ailes à Toulon.
De la même manière que, dans les contrats, il y a des clauses de rupture en cas de descente, il faudra peut-être que les joueurs exigent des clauses de rupture s'ils jouent moins que x minutes. Et il faudra qu'ils décident s'ils préfèrent cirer les tribunes en top 14 ou jouer en D2.
L'exemple de Mermoz n'est pas vraiment pertinent car on pense aux finales qu'il a passé sur le banc mais en réalité, Mermoz n'a jamais fait banquette à Toulon et a toujours eu un temps de jeu très conséquent. Globalement plus important qu'à l'USAP.

Toutes les situations sont à prendre au cas par cas. Aussi, il y a une différence entre être un joueur de complément et ne pas jouer du tout. Peut-être certains préfèreront être remplaçants en Top 14 avec du temps de jeu qu'indiscutables plus bas. Tous les joueurs ne sont pas amenés à être titulaires dans un groupe.
Parfois, on s'imagine que les joueurs ne joueront jamais mais parfois ça passe.
 
Pas d'accord avec toi Doc!

Seguy et Torf sont issus des espoirs. Ils sont là pour bosser, prouver et saisir des opportunités. C'est la vie, c'est le système et sincèrement j'en vois pas de mieux.

Rien à voir avec un joueur comme Malzieu par exemple. Mais là, on est dans le coté "risqué" du professionnalisme. Certains joueurs savent aller chercher le salaire et le statut. Si Malzieu avait signé à Brive, Bègles, Pau, Oyonnax ou autres, il aurait eu une autre considération.

Ca, ça commence à effrayer des joueurs. Des clubs comme le Racing; Toulon ou MPL, c'est bien d'y signer, ça rempli bien le porte monnaie mais souvent il y a l'abîme au bout.

Tu vas m'expliquer l'intérêt d'un Monribot à Toulon, d'un Ollivon qui déprime comme un con, d'un Lassalles quand il a signé, d'un Delboulbes, d'un Wisniewski? 90% "du monde du rugby" savait qu'ils feraient banquette dans leur grande majorité au RCT.

Dubarry et tales au Racing? Et Klemenczak qui vient d'y signer les yeux plein de rêve? Son agent l'a bien brieffé j'espère! Il tente, c'est respectable! Peut être deviendra-t-il international, c'est ce qu'on lui souhaite. Mais si il tombe, il devra assumer.

Guillamon, Bardy, Dumoulin, Malzieu à Montpellier?

Tous ces joueurs feraient le bonheur de bien des clubs de top 14 ou de Prod2+. Est-ce qu'ils sont bien conseillés? Est-ce que leur critère premier est le temps de jeu?

Moi, ce qui me plait en Angleterre par exemple, c'est quand des joueurs "importants" continue à jouer dans des clubs où ils sont moteur. Nowell, Slade, Waldrom à Exceter. Hartley, Lawes, Wood, Foden à Northampton. Ils ne vont pas tous aux Sarries ou aux Harlequins et ça, ça fait monter le niveau du championnat et ça attire d'autres joueurs dans les clubs moins huppés. Ca lisse les valeurs et développe la compétitivité.

L'Usap a toujours réussi ça. Avec des Marti, Mas, Guirado. Et aujourd'hui on signe des mecs intelligents qui priorisent le temps de jeu. Cocagi, Lemalu, Labouteley, Botha, Chateau, Carbou, Ecochard etc... Pourtant certains avec des places pour une banquette en Top 14.

Alors des Torf et Seguy, t'en as toujours eu (même sous Brunel) et t'en auras toujours
A un moment, il y aussi un risque à prendre.
Par exemple, tu cites le Racing. Iribaren, Chouzenoux et Dupichot s'y sont imposés cette saison.
A l'USAP, quand on recrute Boutemmani ou Cocagi en fond de tableau, la situation est similaire.

Puis il y a aussi le cas des joueurs de complément. Tu peux très bien préférer être remplaçants en haut que titulaires indiscutables en bas.
 
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